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L'ancrage territorial des entreprises[modifier | modifier le code]

Le concept d’ancrage territorial, appliqué à une entreprise, désigne un lien coopératif durable entre une entreprise et son territoire d'implantation. Il a été développé en économie territoriale, en géographie économique et en sciences de gestion.

L'ancrage territorial est un concept qui présente un enjeu politique et économique fort car il apparaît comme un objectif de la gouvernance des territoires permettant une création endogène d'emplois (Benco et Lipietz, 2000) et un moyen de sédentariser les entreprises.

Les travaux de recherche utilisant le concept d'ancrage territorial portent notamment sur le développement local, les ressources, la responsabilité sociétale des entreprises, les phénomènes de délocalisation et relocalisation.


définition générale du concept en économie, en géographie et en sciences de gestion[modifier | modifier le code]

Selon Bousquet (2014, p.20), l'ancrage territorial est "le processus et le résultat d’interactions entre entreprise et territoire, fondés sur la création collective de ressources communes, spécifiques et localisées, permettant une longue période de sédentarité d’une entreprise." Cette définition issue des sciences de gestion est inspirée des approches développées en économie (Zimmermann, 1998), en géographie (Mérenne-Schoumaker, 2002), en gestion (Bertrand, 1996, Le Gall et al., 2013)

Les constituants essentiels de l'ancrage territorial sont :

- l'existence d'une action coopérative, permettant notamment des phénomènes d'apprentissage,

- l'absence de droit de propriété sur une partie des ressources issue de cette action collective

- le rattachement de ces ressources à un territoire, qui fait que l'entreprise en sera privée si elle se délocalise,

- le temps long dans lequel s'inscrit cette coopération; l'ancrage demeurant toutefois réversible.

Des exemples d'entreprises ancrées sont constitués par des entreprises implantées dans des pôles de compétitivité, ou ayant une production située dans une appellation d'origine protégée (Frayssignes, 2005, Bélis-Bergouignan et Corade, 2008). Il est toutefois possible que des entreprises soient ancrées sans être rattachées à des institutions de ce type. Mais le seul fait d'être de longue date sur un territoire ne suffit pas à constituer un ancrage s'il n'y a pas de collaboration locale pour produire des ressources nouvelles (May, 2008). A l'inverse, le fait qu'une entreprise garde des relations socialisées forte en dehors du territoire n'interdit pas que celle-ci puisse être ancrée (Bertrand, 1996).

les fondements du concept[modifier | modifier le code]

Le concept d'ancrage territorial repose sur plusieurs champs étudiés en sciences sociales.

- La proximité : l'ancrage territorial est un objet concernant l'économie locale. A ce titre la proximité géographique entre l'entreprise et les acteurs du territoire (politiques, institutions, autres entreprises) est essentielle. Toutefois la seule proximité géographique ne suffit pas à expliquer son développement. Les proximités institutionnelles et organisationnelles favorisent également l'ancrage (Pecqueur et Zimmermann, 2004).

- Les réseaux : les travaux sur les réseaux contribuent à expliquer la possibilité de l'émergence de l'ancrage dés lors qu'ils sont localisés (Carluer, 2006). Le concept d’embeddedness (Granovetter, 1985) est lié à celui d'ancrage même s'il n'intègre pas la composante territoriale.

- Les externalités : les ressources collectivement créées par ancrage, et démunies de droits de propriété, peuvent être considérées comme des externalités. Tous les travaux en économie sur les externalités contribuent à comprendre la nature des ressources issues de l'ancrage, leur diffusion et leur non-transférabilité (Cooke et al., 2005 ; Méchin, 2001). Ces externalités sont généralement considérées comme positives mais peuvent aussi scléroser certaines entreprises ancrées  (Courault, 2005).

- Le territoire : bien que ce concept soit multiforme il est très souvent mobilisé dans l'étude de l'ancrage. Les travaux sur les districts (Becattini, 1992), sur les clusters (Porter, 1998), sur les milieux innovateurs (travaux du GREMI) permettent en partie de comprendre la dynamique de l'ancrage dans sa dimension exogène.

- La stratégie générale d'entreprise : en sciences de gestion, l'ancrage est souvent abordé comme constituant une stratégie de territorialisation (Saives et al., 2011, Le Gall et al., 2013).

spécificités de l'ancrage territorial dans l'approche RSE (responsabilité sociétale des entreprises)[modifier | modifier le code]

Dans le contexte spécifique des travaux portant sur la responsabilité sociétale des entreprises, le concept est mobilisé dans une acception plus spécifique. La norme Iso 26000 relative à la responsabilité sociétale des organisations, précise que « l’ancrage territorial est le travail de proximité proactif d’une organisation vis-à-vis de la communauté. Il vise à prévenir et à résoudre les problèmes, à favoriser les partenariats avec des organisations et des parties prenantes locales et à avoir un comportement citoyen vis-à-vis de la communauté ». Cette vision n'est pas incompatible avec la définition proposée ci-dessus mais elle est plus réductrice.

références[modifier | modifier le code]

Becattini G (1992), Le district industriel : milieu créatif, in Restructurations économiques et territoires, Espaces et Sociétés, n°66-67, L’Harmattan, pp.147-164.

Bélis-Bergouignan, M-C., Corade N. (2008), Fusions des coopératives vinicoles et ancrage territorial, Revue d’Economie Régionale & Urbaine, vol.1, pp. 43-68.

Benko G., Lipietz A. (2000), La Richesse des Régions. Pour une géographie socio-économique, Ed. PUF, Paris, 564 p.

Bertrand N. (1996), L’ancrage spatial des entreprises en milieu rural – De l’espace fonctionnel à l’espace territoire, Thèse de Doctorat ès Economie Appliquée, Université Pierre Mendès-France, Grenoble II, 320 p.

Bousquet François, (2014), "L'influence du lien personnel entre l'entrepreneur et le territoire sur l'ancrage territorial des PME", thèse de doctorat en Sciences de Gestion, Université de Bordeaux, p.20 https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01232234/document

Carluer F. (2006), Réseaux d’entreprises et dynamiques territoriales : une analyse stratégique, Géographie, Economie, Société, vol.8, n°2, pp. 193-214.

Cooke P., Clifton N., Oleaga M. (2005), Social Capital, Firm Embeddeness and Regional Development, Regional Studies, vol.39, n°8, pp. 1065-1077.

Courault B. (2005), PME et industrialisation : que sont devenues les PME du « miracle choletais », Centre d’études de l’emploi, n°53, (1945-2004), 43 p.

Frayssignes J. (2005), Les AOC dans le développement territorial – Une analyse en termes d’ancrage appliquée aux cas français des filières fromagères, Thèse de Doctorat ès Sciences de Gestion, Institut National Polytechnique de Toulouse, 469 p.

Gall (Le) S., Bougeard-Delfosse C., Gentric M. (2013), Les leviers stratégiques de l’ancrage territorial : le cas de SAUR dans la région Ouest, Géographie, Economie, Société, n°15, pp.365-384.

Granovetter M. (1985), Economic Action and Social Structure: The Problem of Embeddedness, American Journal of Sociology, vol.91, n°3, pp. 481-510, Trad. in Sociologie Economique, 2008, Ed. du Seuil.

May N. (2008), Les Mutuelles d’assurance niortaises : un exemple d’ancrage territorial ?, 45ème Colloque de l’ASRDLF, Territoires et action publique territoriale : nouvelles ressources pour le développement régional, Québec, Canada, 17 p.

Méchin A. (2001), La capacité urbaine d'attraction et d'ancrage des établissements : une analyse par les ressources dynamiques, Thèse de Doctorat ès Sciences de Gestion, Université de Caen, 422 p.

Mérenne-Schoumaker B. (2002), La localisation des industries – Enjeux et dynamiques, Ed. Presses Universitaires de Rennes, 243 p.

Pecqueur B., Zimmermann J-B. (2004),  Economie de proximités, Ed. Hermès, Lavoisier Paris, 264 p.

Porter M. (1998), Clusters and the New Economics of Competition, Harvard Business Review, Nov-Dec, pp77-90

Saives A-L., Desmarteau Robert H., Kerzazi L. (2011), Modèle d’affaires, proximité et territorialisation des entreprises – Le cas de l’agroalimentaire au Québec, Revue Française de Gestion, n°213, pp 57-75.

Zimmermann J-B. (1998), Nomadisme et ancrage territorial : propositions méthodologiques pour l’analyse des relations firmes-territoires, Revue d’Économie Régionale et Urbaine, n°2, pp. 211-230.